Edward England : Le pirate avec une conscience
L'âge d'or de la piraterie, qui s'étend de la fin du XVIIe au début du XVIIIe siècle, a donné naissance à des personnages à la fois impitoyables et romantiques. Parmi eux, Edward England, un pirate dont la carrière a été aussi mouvementée que les mers sur lesquelles il a navigué.
Ce qui le distingue, cependant, c'est un certain code moral qui semble en contradiction avec son métier sans foi ni loi.
Du corsaire au pirate : La transformation d'Edward England
Le prélude à la piraterie
Dans les annales de la piraterie, le nom d'Edward England se distingue non seulement par ses raids audacieux, mais aussi par la trajectoire de sa carrière. Né Edward Seegar en Irlande à la fin du XVIIe siècle, il s'est aventuré dans le monde de la corsaire à une époque où les nations approuvaient tacitement les pirates tant qu'ils s'attaquaient aux navires ennemis.
Naviguant initialement sous la bannière de la légitimité, l'Angleterre était motivée à la fois par le frisson de la chasse et la promesse de richesses.
James Harriott fait remarquer que "dans les eaux troubles de la guerre maritime, la frontière entre corsaire et pirate est souvent ténue. Le parcours d'Edward England illustre cette transition, dictée par les circonstances et les choix personnels".
Les catalyseurs de la transformation
- La capture par des pirates : Le passage d'England du corsaire au pirate a été influencé par sa capture par des pirates au large des côtes de la Jamaïque. Au lieu d'être rançonné ou tué, il est convaincu de se joindre à eux, ce qui marque sa première incursion dans la piraterie.
- Commandement du "Pearl" : Faisant la preuve de son courage et de ses capacités de chef, England se voit bientôt confier le commandement d'un navire, le "Pearl". Sous sa direction, le navire devient célèbre pour ses attaques rapides et impitoyables.
- Le havre de Madagascar : Le paradis des pirates de Madagascar, en particulier l'île de St. Mary's, a joué un rôle essentiel dans la carrière d'England. Il lui sert de base, de lieu de récupération, de planification et de partage des récits d'exploits.
- Code moral : Contrairement à beaucoup de ses contemporains, England était connu pour une certaine chevalerie. Il libère souvent les prisonniers sains et saufs, un trait de caractère qui finira par causer sa perte auprès de son équipage moins clément.
L'apogée de la piraterie et le dilemme éthique
La réputation d'Edward England grandit, tout comme la taille de sa flotte et l'ampleur de ses raids. Des côtes africaines à l'océan Indien, son drapeau inspire la crainte aux navires marchands.
Pourtant, ce sont ses penchants moraux qui le distinguent. Après avoir capturé le navire "Cassandra", l'Angleterre décide d'épargner son capitaine, James Macrae, ce qui provoque une mutinerie au sein de l'équipage. Cette position éthique, aussi noble soit-elle, souligne les tensions au sein de la communauté des pirates entre l'efficacité impitoyable et un semblant d'honneur.
Elaine Turner, historienne maritime, déclare à propos de cette période : "L'héritage de l'Angleterre a de multiples facettes. Si son nom évoque des batailles féroces et des trésors volés, ce sont ses moments de clémence qui offrent un portrait nuancé d'un pirate pris entre deux mondes."
La dualité de la carrière d'Edward England, de corsaire à pirate, est un microcosme des complexités de la vie maritime pendant l'âge d'or de la piraterie.
Un code d'honneur parmi les voleurs : Le paradoxe éthique d'Edward England
Une éthique non conventionnelle dans le monde de la piraterie
Dans le monde impitoyable de la piraterie, Edward England fait figure d'anomalie. Alors que les récits de pirates sont généralement chargés d'histoires de cruauté, de trahison et d'impitoyabilité, England a souvent fait preuve d'un sens de l'honneur et d'une moralité surprenants.
L'historien Lawrence Keating observe que "les actions d'England remettent en question la notion stéréotypée des pirates. Son code d'honneur, bien qu'inattendu, illustre l'éventail des comportements humains, même au sein d'une communauté souvent considérée comme sauvage."
Actes de miséricorde notables
- Le cas du "Cassandra" : L'épisode le plus révélateur de la nature miséricordieuse de l'Angleterre se situe peut-être après la capture du navire "Cassandra". Malgré les pressions exercées par son équipage, l'Angleterre choisit d'épargner le capitaine James Macrae, même au prix d'une mutinerie. Cet acte n'est pas seulement une démonstration de bonté, mais aussi une affirmation de ses principes face au sentiment populaire.
- Traitement des prisonniers : De nombreux témoignages de marins et de marchands capturés indiquent que l'Angleterre a souvent traité ses prisonniers avec un degré surprenant de civilité, leur fournissant de la nourriture et les libérant parfois sains et saufs.
- Prise de décision concernant le butin : L'Angleterre était connue pour distribuer plus équitablement les richesses capturées au sein de son équipage, en veillant à ce que même les marins les plus humbles reçoivent leur juste part. Cette répartition équitable souligne son sens de la justice.
- Éviter les effusions de sang inutiles : Contrairement à nombre de ses contemporains qui s'engageaient dans des batailles pour le simple plaisir, l'Angleterre choisissait souvent d'éviter les conflits, sauf en cas d'absolue nécessité, en privilégiant la sécurité de son équipage et en minimisant les pertes humaines.
La chute d'un pirate éthique
Le sens moral d'England, bien que louable, l'a finalement mené à sa perte. Les valeurs mêmes qui le distinguaient des autres pirates devinrent une pomme de discorde au sein de son équipage, dont beaucoup recherchaient une direction plus agressive et un pillage plus abondant.
Le point culminant de ces tensions est survenu après l'épisode du "Cassandra", conduisant à une mutinerie qui a finalement chassé England de son propre navire.
Elisa Cortez, spécialiste renommée de la piraterie, remarque que "l'héritage d'Edward England offre une leçon cruciale. Même dans les domaines où la trahison est la norme, il y a des individus qui défient le statu quo grâce à leur sens intrinsèque du bien et du mal".
La vie d'England témoigne de l'idée que même dans les coins les plus sombres de l'histoire, il existe des récits d'humanité et d'honneur.
Trahison et chute : Le crépuscule de la carrière de pirate d'Edward England
Le mécontentement de l'équipage
Edward England, autrefois célébré pour ses compétences exceptionnelles en matière de navigation et sa relative clémence envers les captifs, a commencé à faire face à des défis internes, ses principes s'éloignant de plus en plus des attentes sanguinaires de la piraterie.
Sa réputation de "pirate honorable" ne fait pas l'unanimité ; au contraire, pour de nombreux membres de son équipage, ce même code d'éthique devient un sujet de discorde.
L'historienne Hannah Ridley déclare : "Le paradoxe de la carrière d'England est que les qualités qui lui ont valu le respect de certains milieux sont les mêmes qui ont semé la discorde au sein de son équipage".
Événements clés menant à sa chute
- L'incident du "Cassandra" : La capture du navire "Cassandra" marque un tournant dans la carrière de l'Angleterre. Après avoir saisi le navire, la décision de l'Angleterre d'épargner le capitaine James Macrae n'est pas du goût de nombreux membres de son équipage. Cet incident est devenu emblématique d'un fossé plus large entre l'Angleterre et ceux qui souhaitaient une approche plus impitoyable de la piraterie.
- Mutinerie à l'horizon : Le mécontentement qui couvait au sein de l'équipage aboutit à une mutinerie. Menés par une faction comprenant notamment John Taylor et Olivier Levasseur (connu sous le nom de "La Buse"), les mutins privent l'Angleterre de son commandement, soulignant la fragilité du leadership dans le monde perfide de la piraterie.
- Abandon en Afrique : Après la mutinerie, England, accompagné de trois loyalistes, est envoyé à la dérive sur un petit bateau, un geste paradoxalement clément compte tenu du sort habituel des capitaines pirates déchus. Marqué sur l'île Maurice, England mène une existence rude, qui contraste fortement avec l'époque où il commandait des navires et des équipages.
Les derniers jours et l'héritage
Loin de l'époque où il commandait les vastes mers, England passa ses derniers jours dans une relative obscurité à l'île Maurice. Dépouillé de son pouvoir et de son influence, il s'est contenté de vivre dans la marginalité, avant de succomber à la maladie et au dénuement. Pourtant, l'héritage d'Edward England dans les annales de la piraterie est unique.
Le professeur Andrew Gale note que "dans un monde défini par la trahison, l'histoire d'England est un rappel puissant que les principes personnels peuvent parfois être à la fois une bénédiction et une malédiction".
Son histoire, celle de l'honneur au milieu de la tromperie et de l'humanité dans un monde de brutalité, reste un chapitre marquant de l'ère de la piraterie.
L'essentiel à savoir sur Edward England
- Qui était Edward England ?
Un capitaine de pirates célèbre au début du XVIIIe siècle, principalement actif dans l'océan Indien.
- Quelle est l'histoire du drapeau Jolly Roger d'Edward England ?
Son drapeau représentait un crâne surmontant deux os de la cuisse croisés, un motif qui est devenu l'un des symboles les plus reconnaissables de la piraterie.
- Quelles actions importantes England a-t-il entreprises en tant que pirate ?
Il a mené plusieurs raids réussis, l'un des plus célèbres étant la capture du navire "Cassandra" au large de la côte de Malabar, en Inde.
- Comment la carrière de pirate d'Edward England a-t-elle pris fin ?
Après avoir fait preuve de clémence à l'égard d'un capitaine capturé, une décision qui a déplu à son équipage, celui-ci l'a marronné sur l'île Maurice en 1720.
- Qu'est-il advenu d'Edward England après son marronnage ?
Il a vécu peu de temps à l'île Maurice, dans une relative pauvreté et dans l'obscurité, avant d'y mourir.